Il y a une petite pratique spirituelle que je recommande : aller dans un endroit public, comme dans un café, là où vous pouvez vous asseoir, dans un parc, et regarder les gens, regarder les gens. La différence entre les gens qui regardent ordinairement les autres et vous-mêmes qui allez les regarder, c’est que votre pratique consiste à ne plaquer aucun jugement ni aucune étiquette sur les autres. Vous leur permettez d’être comme ils sont, comme ils marchent, comme ils sont assis, quoi qu’ils fassent, et vous appréciez l’incroyable spectacle de la multiplicité des formes humaines.
Il n’y a ni bons, ni mauvais, ni quoi que ce soit. Simplement, vous leur permettez d’être et le mental ne les qualifient aucunement. Vous êtes là en tant qu’observateur innocent. C’est une chose magnifique qui affecte même le champ d’énergie là où vous vous trouvez. Vous apportez une fréquence différente, mais c’est une chose secondaire. Ne vous mettez pas à penser « Je suis ici pour apporter une fréquence différente ».
Soyez simplement là comme observateur vigilant. Vous commencez à aimer les autres humains. C’est une chose difficile pour certaines personnes. C’est facile d’aimer un chien. Oui, c’est habituellement plus facile d’aimer un chien qu’un humain, parce que le chien n’est pas embarrassé par un mental. Le chien ne vous juge pas. Son amour est inconditionnel. Il remue la queue. C’est facile d’aimer une telle créature. Les humains sont différents : « Tu es qui toi ? Qu’est-ce que tu veux ? Qu’est-ce qu’il me veut ? ».
C’est donc une belle pratique. Bien sûr, l’étape suivante va consister à regarder de la même façon les gens que vous connaissez très bien, quand ils se déplacent là où vous vous trouvez, à la maison ou partout ailleurs, ces gens avec qui vous partagez un long passé. Soyez alors présents, même avec les gens avec qui vous partagez beaucoup de passé. Mais votre pratique commence pour ainsi dire avec des étrangers avec qui vous ne partagez pas de passé et l’étape suivante, c’est avec les proches, les amis, la famille. Vous les observez simplement pendant de brefs moments sans vouloir quoi que ce soit.
Faites-le avec vos enfants sans leur dire : « Tu devrais faire ceci ! Pourquoi ne fais-tu pas cela ? ». Vous pouvez leur dire « brosse tes dents », c’est OK, mais observez-les. C’est magnifique. Vous incorporez une pratique de conscience dans votre vie quotidienne. C’est très plaisant. C’est si agréable ! Je le fais depuis de nombreuses années, observer les gens. Et l’on aime tout le monde. Peu importe à quoi ressemblent les gens. Tous représentent la forme humaine qui s’exprime de multiples manières.
Il est plus probable que les gens ne vous remarquent pas lorsque vous les observez dans cette présence silencieuse. Il est très rare que vous attiriez ainsi l’attention. Ce n’est peut-être pas très intéressant pour l’ego encore que certains egos sont mal à l’aise avec l’attention. Il y a deux états égoïques, l’un consiste à vouloir être vu et l’autre à avoir peur d’être vu. Ce sont deux facettes de l’ego. L’ego pourrait dire : « OK, je vais aller dans des endroits où les gens se regardent ».
Il y a longtemps, très très longtemps, je vivais en Espagne. C’était dans les années 60, quand j’étais adolescent. Cela a changé maintenant, mais à l’époque, tous les samedis soirs… Il y avait des cafés dans l’avenue principale, l’un à côté de l’autre. Tous les samedis soirs, les gens se mettaient sur leur trente-et-un et faisaient ainsi les cent pas sur l’avenue. Et les gens assis dans les cafés regardaient les autres faisant les cent pas. Ensuite, les promeneurs prenaient place dans un café et en regardaient d’autres faisant les cent pas.
C’était l’activité agréable du samedi soir. Cela a changé maintenant. Les gens ne s’habillent plus. Mais vouloir être vu est une activité égoïque. L’inverse est la peur d’être vu : « J’espère que personne ne me regarde ». C’est également l’ego. Normalement, on pourrait croire que l’ego, c’est juste quelqu’un qui dirait « regarde-moi », mais l’inverse est tout aussi égoïque, celui qui est timide.
Il s’agit de dépasser les deux. Qu’importe que les gens vous regardent ou non. Si vous n’êtes pas là en tant que personne pensante, si vous êtes là en tant que présence, peu importe s’ils vous regardent. Cela n’ajoute rien à qui vous êtes, ni n’enlève quoi que ce soit à qui vous êtes. Même l’attention d’une centaine de personnes n’ajouterait rien à qui vous êtes en vérité. Pour l’ego, cela pourrait être une grosse affaire. Beaucoup d’egos aiment l’attention, excepté ceux qui en ont peur. Si vous êtes en situation d’être regardé, l’idée est de rester calme et présent, dépassant à la fois la timidité qui pousse à ne pas vouloir être vu et la fierté liée au fait que tout le monde vous regarde.
L’ego est narcissique. L’image de qui vous êtes dans votre mental qui est renforcée par les autres. C’est un fantôme imaginaire.
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